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CONTE ARABE.

il vient baiser la frange de votre robe sacrée, & vous supplier d’entrer dans son humble demeure, qui est enchâssée dans ces déserts arides comme une émeraude dans le plomb ». Les nains, après avoir parlé ainsi, restèrent debout les mains croisées sur l’estomac, & dans un profond silence.

Pendant cette belle harangue, Vathek s’étoit saisi de la corbeille, & long-tems avant qu’elle fût finie, les fruits s’étoient fondus dans sa bouche. À mesure qu’il les mangeoit, il devenoit pieux, récitoit ses prières, & demandoit en même tems l’Alcoran & du sucre.

Il étoit dans ces dispositions, quand les tablettes, qu’il avoit posées à l’apparition des nains, lui donnèrent dans la vue ; il les reprit : mais il pensa tomber de son haut, en y voyant en grands caractères rouges, tracés par la main de Carathis, ces paroles qui étoient d’un à-propos à faire trembler : « Garde-toi bien des vieux docteurs & de leurs petits messagers qui n’ont qu’une coudée ; méfie-toi de leurs supercheries pieuses ; au lieu de manger leurs melons, il faut les mettre eux-mêmes à la broche. Si tu es assez foible pour entrer chez eux, la porte du palais souterrein se fermera, & son mouvement te mettra en lambeaux. On