Page:Bedier - La Chanson de Roland.djvu/117

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XCII

Olivier dit : « Je n’ai pas le cœur aux paroles. Votre olifant, vous n’avez pas daigné le sonner, et Charles, vous ne l’avez pas. Il ne sait mot de ces choses, le preux, et la faute n’est pas sienne, et les vaillants que voici ne méritent, eux non plus, nul blâme. Or donc, chevauchez contre ceux-là de tout votre courage ! Seigneurs barons, tenez fermement en bataille ! Je vous en prie pour Dieu, soyez résolus à bien frapper, coup rendu pour coup reçu ! Et n’oublions pas le cri d’armes de Charles. » A ces mots les Français poussent le cri d’armes. Qui les eût ouïs crier « Montjoie ! » aurait le souvenir d’une belle vaillance. Puis ils chevauchent, Dieu ! si fièrement, et, pour aller au plus vite, enfoncent les éperons, et s’en vont frapper, qu’ont-ils à faire d’autre ? et les Sarrasins les reçoivent sans trembler. Francs et païens, voilà qu’ils se sont joints.

XCIII

Le neveu de Marsile — il a nom Aelroth — tout le premier chevauche devant l’armée. Il va disant sur nos Français de laides paroles : « Félons Français, aujourd’hui vous jouterez contre les nôtres. Il vous a trahis, celui qui vous avait en garde. Bien fou le roi, qui vous laissa aux ports ! En ce jour, douce France perdra sa louange, et Charles, le Magne, le bras droit de son corps. » Quand Roland l’entend, Dieu ! il en