Page:Bedier - La Chanson de Roland.djvu/59

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XXXII

Blancandrin est venu devant Marsile ; il tient par le poing le comte Ganelon. Il dit au roi : « Salut, au nom de Mahomet et d’Apollin, de qui nous gardons les saintes lois ! Nous avons fait votre message à Charles. Vers le ciel il éleva ses deux mains, loua son Dieu, ne fit autre réponse. Il vous envoie, le voici, un sien noble baron, qui est de France et très haut homme. Par lui vous apprendrez si vous aurez la paix ou non. » Marsile répond : « Qu’il parle, nous l’entendrons ! »

XXXIII

Or le comte Ganelon y avait fort songé. Par grand art il commence, en homme qui sait parler bien. Il dit au roi : « Salut, au nom de Dieu, le Glorieux, que nous devons adorer ! Voici ce que vous mande Charlemagne, le preux : recevez la sainte loi chrétienne, il veut vous donner la moitié de l’Espagne en fief. Si vous ne voulez pas accepter cet accord, vous serez pris et lié de vive force ; à la cité d’Aix vous serez emmené ; là, par jugement, finira votre vie : vous mourrez de mort honteuse et vile. » Le roi Marsile a frémi. Il tenait un dard, empenné d’or. Il veut frapper, mais on l’a retenu.