Page:Beecher Stowe - La Case de l’oncle Tom, Sw Belloc, 1878.djvu/130

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elle sur le banc proche du feu, et bientôt, tenant l’enfant endormi, qu’elle n’avait jamais pu se résoudre à quitter un instant, elle tomba dans un profond sommeil, mais sans relâcher son inflexible étreinte.

Revenus au salon, M. et madame Bird, chose étrange ! ne firent ni l’un ni l’autre la moindre allusion à leur conversation précédente ; la femme était toute à son tricot ; le mari se montrait absorbé dans son journal.

« Je ne saurais imaginer qui elle est, et ce qu’elle est ! dit-il enfin en posant la feuille.

— Quand elle se réveillera et sera un peu remise, nous verrons, répliqua madame Bird.

— Je dis, femme…

— Quoi, mon cher ?

— Ne pourrait-elle mettre une de vos robes ? En défaisant un ourlet, un pli ; elle me paraît plus grande que vous. »

Un sourire très-visible glissa sur le visage arrondi de madame Bird, comme elle répondait : « Nous verrons. » Une autre pause, et M. Bird reprit :

« Je dis, femme…

— Eh bien, quoi ? mon ami ?

— N’y a-t-il pas un vieux manteau de bombazine que vous gardez pour me couvrir quand je m’assoupis un peu après dîner ? Vous pourriez tout aussi bien le lui donner. Elle a si grand besoin d’habits ! »

En ce moment, Déborah parut à la porte pour dire que la femme réveillée demandait à voir maîtresse. M. et madame Bird se rendirent à la cuisine, suivis des deux fils aînés, le petit monde étant déjà consigné au lit.

La femme, assise devant le feu, attachait sur la flamme un regard fixe et navré qui ne conservait rien de sa précédente agitation.

« Vous avez désiré me voir ? lui dit, d’un ton doux, madame Bird ; j’espère que vous allez mieux maintenant, ma pauvre femme ? »