Page:Beecher Stowe - La Case de l’oncle Tom, Sw Belloc, 1878.djvu/27

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

considère la religion comme une denrée de prix, pourvu qu’elle soit de bon aloi, et sans tare.

— Eh bien ! Tom a la vraie et la bonne, si jamais il en fut. À la dernière chute des feuilles je l’envoyai seul à Cincinnati pour affaires de négoce ; au retour, il me rapporta cinq cents dollars. « Tom, lui avais-je dit, je me fie à vous parce que je vous crois chrétien ; je sais que vous ne voudriez pas me tromper. » Il n’eut garde vraiment. J’étais sûr qu’il me reviendrait ; et pourtant là-bas il ne manquait pas de drôles pour lui dire : « Tom, que ne prenez-vous le chemin du Canada ? » — « Oh ! moi, pas pouvoir : maître s’être fié à Tom ! » Je l’ai su par d’autres. Je suis fâché de me séparer de Tom, je l’avoue. Allons ! il faut qu’il couvre la différence, et solde ma dette ; vous diriez oui, Haley, si vous aviez un peu de conscience.

— J’en ai autant qu’il en faut dans les affaires — tout juste assez pour jurer dessus, dit le marchand d’un ton badin ; et je ne demande pas mieux que de faire ce qui est raisonnable pour obliger des amis, mais c’est par trop exiger d’un pauvre homme — vrai, c’est trop dur ! »

Le marchand soupira d’un air de componction, et se versa une nouvelle rasade.

« Eh bien ! donc, Haley, comment vous plaît-il de traiter ?

— N’avez-vous pas quelque chose, garçon ou fille, à jeter dans la balance avec Tom ?

— Hem !… personne dont je puisse me passer. À dire vrai, il faut une nécessité absolue pour me décider à vendre. Je n’aime pas à me défaire de mes mains — c’est un fait. »

Ici, la porte s’ouvrit, et un petit quarteron, de quatre à cinq ans, fit son entrée dans la salle. Il était remarquablement beau et attrayant. Ses cheveux, aussi fins que de la soie grège, tombaient en boucles autour de ses joues rondes, à riantes fossettes, tandis que deux grands