Page:Beecher Stowe - La Case de l’oncle Tom, Sw Belloc, 1878.djvu/36

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Or, il advint qu’en approchant de la porte, Éliza entendit assez pour comprendre qu’un trafiquant d’esclaves faisait à son maître des propositions.

Elle eût bien voulu s’arrêter en sortant pour en savoir davantage, mais sa maîtresse l’appelait.

Elle croyait avoir entendu qu’il s’agissait de son garçon. — Sans doute elle se trompait. Le cœur gros et serré, elle pressa instinctivement l’enfant contre son sein avec une telle force, qu’il la regarda tout étonné.

« Éliza, ma fille, qu’as-tu donc aujourd’hui ? » demanda sa maîtresse, lorsqu’après avoir renversé la cruche à eau et fait tomber la table à ouvrage, elle apporta un peignoir du matin, au lieu de la robe de soie qu’on l’avait envoyé chercher.

Éliza tressaillit. « Oh ! maîtresse ! dit-elle, en levant les yeux ; puis fondant en larmes, elle s’assit et se mit à sangloter.

— Éliza, enfant ! qu’as-tu ? qu’y a-t-il ?

— Oh ! maîtresse ! maîtresse ! il y avait dans la salle à manger un marchand d’esclaves qui parlait au maître. Je l’ai entendu.

— Eh bien, folle ! supposons que cela soit.

— Oh ! maîtresse, croyez-vous que le maître voulût vendre mon Henri ? et la pauvre créature sanglota de plus belle.

— Le vendre ! Eh non, enfant que tu es ! ne sais-tu pas que ton maître n’a jamais eu affaire à ces trafiquants du Sud, et qu’il n’a jamais songé à vendre aucun de ses esclaves, tant qu’ils se conduisent bien ? Folle tête ! aller s’imaginer que quelqu’un voudrait acheter son Henri ! Crois-tu que tout le monde en raffole comme toi ? — Allons, sèche tes larmes, et agrafe ma robe. Là, maintenant, relève mes cheveux ; fais-moi cette jolie tresse que tu as apprise l’autre jour, et ne t’avise plus d’écouter aux portes.

— Bien sûr, maîtresse, vous ne donneriez pas votre consentement à… à…