Page:Beecher Stowe - La Case de l’oncle Tom, Sw Belloc, 1878.djvu/544

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leur élégant feuillage avec toutes ses découpures, et, dans l’air, régnait cette silencieuse paix qu’il semblerait impie de troubler. Legris approchait des cases lorsqu’il crut distinguer un chant. Les sons de ce genre, en pareil lieu, étaient chose rare. Il s’arrêta pour écouter. Une voix de ténor, mélodieuse, pénétrante, chantait :

Dès qu’aux célestes demeures
Mon titre deviendra clair,
Qu’importent les sombres heures,
Les souffrances de la chair ?
Qu’importe que l’on m’outrage,
Que m’importent les soucis !
L’enfer, Satan, et sa rage,
De tout cela je me ris.
Ah ! que fondent sur ma vie,
Malheur, chagrin et dégoût,
C’est là-haut qu’est ma patrie,
Mon Dieu, mon ciel, et mon tout !

« Ah ! ah ! c’est comme ça ! se dit Legris. Ho ! vraiment ? il en est logé là ! — Que je hais ces maudits hymnes méthodistes ! Ici, nèg », s’écria-t-il, tombant à l’improviste sur Tom, et levant sur lui sa cravache : comment oses-tu faire ce vacarme quand tu devrais être couché ? Ferme-moi ta vieille damnée gueule noire, et rentre au plus vite, entends-tu ?

— Oui, maître, dit Tom avec une soumission joyeuse, et il se leva pour obéir.

L’air heureux et tranquille du noir mit Legris hors des gonds ; il détourna son cheval du côté de Tom, et lui travailla la tête et les épaules avec son fouet.

« Là ! chien ! dit-il, vois si cela te paraît bon ! »

Mais les coups ne tombaient que sur la chair, non plus comme autrefois sur le cœur. Tom demeura parfaitement