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Page:Belloy - Christophe Colomb et la decouverte du Nouveau Monde, 1889.djvu/55

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n’était pas gelée, quoique les marées y soient si fortes, qu’elles y montaient à vingt-six brasses, et descendaient autant. Il est vrai que le Tille dont parle Ptolémée se trouve là où il le place, et se nomme aujourd’hui Frislande. »

Malgré des erreurs de distance et surtout de latitude, que l’état actuel de la science géographique permet à un enfant de relever, ce passage témoigne de la rare sagacité de son auteur. Il distingue, le premier parmi les modernes, deux îles de Thulé dont la moins étendue et la plus méridionale appelée Finlande est l’ultima Thule de Ptolémée et de Sénèque. On dirait, suivant l’expression de Humboldt, que Colomb ait deviné ce que les recherches sur la géographie ancienne ont rendu de plus en plus probable dans les temps modernes.

Notons à ce propos que le même savant, dans l’examen qu’il fait du passage cité, n’admet pas la supposition que Christophe Colomb ait pu recevoir en Islande des informations de nature à éveiller en lui l’idée de la grande entreprise qu’il devait plus tard mettre à fin. « Il aurait pu savoir, dit-il, que les colons scandinaves du Groënland avaient découvert la terre de Vinland, que des pêcheurs de Frislande avaient abordé à une terre appelé Drogeo ; toutes ces nouvelles ne lui auraient aucunement paru se lier à ses projets. » Le célèbre géographe, Adam de Brême, a bien sans doute reconnu le Vinland dès le dixième siècle, plus tard Ortelius a fait justement remonter à des Norwégiens du neuvième siècle la première découverte de l’Amérique continentale ; mais les ouvrages de ces auteurs n’ont paru, les premiers que longtemps après la mort de Colomb, et les seconds que dix ans avant.