Aller au contenu

Page:Belon - L’histoire naturelle des estranges poissons marins.djvu/102

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

PEndant le temps que nous avons esté en Egypte en la ville du Cayre, ie interroguay plusieurs s’il y avoit aucune nouvelle de ce Cheval de riviere ou Hippopotamus: mais ils n’ẽ ont de reste que la fable en leur memoire. Quelques uns retiẽnent celle mesme qu’on en ha escript anciennement, scavoir qu’il est fort terrible & cruel, & qu’il faille faire des fosses pour le prendre, toutesfois iamais hõme ne m’a sceu dire a la verité qu’il en ait veu d’autre que celuy que i’ay descrit. Celuy qui est a Constãtinoble fut pris entre la ville qui est maintenant nomee le Saet, & le Cayre: & mesmes ceuls du Saet l’apporterẽt au Cayre au Bacha, ou il demeura quelques sepmaines attendant qu’on l’envoyroit a Constãtinoble par mer. Cela est cõforme a ce que Pline en ha escrit. Car il dit qu’il est pris au dessus du Saet, entre les iurisdictiõs d’Egypte. Ie croy que c’est le mesme lieu ou anciennement furent prins les autres que Marcus Scaurus feit porter a Rome.

XXIIII.

De la nature de l’Hippopotamus.

QUãt a ce qui est de la nature de l’Hippopotamus, ie n’ay nõ plus a en escrire que ce qui en ha esté desia dit par les anciẽs. C’est qu’il se depart la nuict du Nil, ou il ha demeuré caché tout le iour & va aux bleds qu’il paist toute nuict: mais il chemine a recullõs a fin que par telle astuce lon ne cognoisse poĩt ses pas. Au surplus l’on ha escript qu’il a esté nostre maistre & enseigneur en quelque partie de medecine, c’est a scavoir en la phlebotomie, de laquelle il est inventeur: car quand il s’est par trop engressé par se saouler oultre mesure, il vient a la rive du Nil, & la trouvãt quelques Cicots ou troncs des cannes qu’on y a taillees, choisit les pl agues qu’il peult, & se picquant certaine veine de la iambe, se fait saigner: & apres qu’il ha assez saigné, il restoupe la plaie de limon. Les cuirs des Hyppopotames estoient bien requis le temps passé pour faire des salades & boucliers: car ils estoient impenetrables aux flesches & aux espieus, dont les esclaves des Ethiopiens en avoient grãd gaing, d’autant qu’ils en apportoient beaucoup vẽdre aux foires qu’on tenoit en une ville des Troglodites nómee Aduliton. Les medecins n’ont faict grande mention, qu’il fust grãdement requis en l’usage de medecine. Vray est que quelques