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Page:Belot - Mademoiselle Giraud, ma femme (47e éd.).djvu/30

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MA FEMME

sante, et je fus un instant tellement séduit, que je ne craignis pas un jour de le lui avouer. Elle s’avança tout près de moi, me dévisagea à l’aide de son pince-nez et me dit :

— Vous perdez votre temps, cher monsieur ; j’ai eu un mari qui a suffi pour me faire prendre tous les hommes en grippe ; je n’éprouve pas le désir de le remplacer.

Au lieu de ces mots : j’ai eu un mari, elle aurait pu dire : j’ai un mari, car le comte de Blangy, assure-t-on, vit encore dans quelque coin de la France ou de l’étranger. Riche, titré, très-considéré dans le monde, attaché au ministère des affaires étrangères, où l’on vantait ses mérites, il s’était, deux années auparavant, trouvé tout à coup, dans un salon de la Chaussée-d’Antin, en présence de Berthe et de Paule, les deux amies de couvent, les deux inséparables, la brune et la blonde, comme on les appelait.

La beauté de ces deux jeunes filles le frappa ; il prit des renseignements sur elles, se fit présenter dans leurs familles, hésita quelque temps entre la brune et la blonde, se décida pour la blonde et l’épousa. Six mois s’écoulèrent pendant lesquels les amis de M. de Blangy remarquèrent une grande altération dans ses traits

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