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Page:Belzoni - Voyages en Égypte et en Nubie, 1821, tome 1.djvu/231

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je m’en retournai au bateau pour y coucher.

Le lendemain matin, je me rendis de nouveau chez lui. Je le trouvai dans la chambre d’audience, entouré des cheils ou anciens du village qui devaient faire les fonctions du jury. M’ayant assigné une place à sa droite, il fit apporter du café et des pipes ; car la justice même ne peut se passer, en Orient, de ces accessoires. Il avait déjà exposé ma cause aux anciens ; et ceux-ci, avant d’entendre la partie adverse, avaient jugé que son avis était parfaitement équitable. Si j’eusse eu tort, ils auraient jugé de même. Dans l’empire turc la liberté des jurés ne va pas jusqu’à contredire un juge. Ma partie adverse arriva enfin ; le cacheff la reçut poliment, mais avec les sourcils froncés, ce qui dut être pour elle d’un mauvais augure ; aussi ne la laissa-t-il pas long-temps en doute. Il déclara aux bateliers qu’à l’exception de quatre-vingts ardeps, quantité que j’avais consenti à laisser, toute la cargaison devait être enlevée du bateau qu’ils m’avaient loué, et qu’il n’y avait pas d’autre moyen d’arranger l’affaire. Il s’adressa ensuite aux anciens pour savoir s’ils avaient quelque objection à faire. Ils furent d’avis que mes adversaires, ne se défendant point, se condamnaient eux-mêmes par leur silence. Ce fut la fin du procès : le jury