Page:Benjamin - Grandgoujon, 1919.djvu/234

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
236
GRANDGOUJON

— Cher ami, j’ai besoin de quelques détails typiques, que je veux tenir de vous. Vous avez vu cent traits d’héroïsme. Vous-même fûtes un héros : donnez-moi une anecdote.

Sur la demande du public, les enfants rapatriés, de nouveau sur l’estrade, entonnaient un chant :

Gloire aux soldats tombés pour la France éternelle.

Grandgoujon, distrait par les voix, la tête vide, balbutia :

— Mais… quel genre ? Des anecdotes ? J’en sais. De là à les dire…

— Je les dirai, fit Punais souriant. Pourvu que j’aie l’idée.

— L’idée ? reprit Grandgoujon. Diable !… Il faudrait que je vous raconte un peu tout… J’étais avec un photographe ambulant…

— Un ?… Oh ! voilà ! Détail admirable ! s’écria Punais passionné. Un photographe ambulant en pleine bataille ?

— Et il avait un mot drôle, chaque fois que s’écrasait une marmite.

— Un mot drôle ? Voilà ! voilà ! C’est exquis, je ne connais rien de plus joli ! s’écria Punais qui, déjà, n’entendait plus, déroulant en sa cervelle quelque période agréable sur cette indication. J’ai ce qu’il me faut ! Merci ! Les enfants ont terminé ! C’est à moi !

Il disparut dans un lavabo, fit faire deux tours de gorge à un liquide précieux qu’il avait dans