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GRANDGOUJON

nistères ! les circulaires ! À l’Intérieur on m’appelle le Fol, et j’en ai de la fierté !…

— Vieux, dit Grandgoujon, il faut que je sois dans trois minutes aux écuries de l’École.

Il tapa sur le carreau pour que le chauffeur partît. En route, il prépara sa monnaie, et, regardant le compteur :

— Sacrédié : douze cinquante ! En effet, il y va largement ! Si c’est pour son charbon !…

Mais il devait aussi s’occuper de Madame des Sablons, car qui venait-il voir là ? Ah ! le veinard ! Civil ! Pas mobilisé !

Et Grandgoujon se sentait de nouveau sans force pour pénétrer dans cette caserne, qu’il n’eût pourtant pas trouvée laide sur une estampe, animée de soldats du siècle dernier.

Quinze-Grammes le guettait :

— Ben tu t’en fais pas, toi ? On voit qu’t’es gros ! Allez, allez, à la visite !

— Quelle visite ?

Grandgoujon retrouvait ses yeux égarés de chien battu.

— Visite des incorporés.

Alors ils se dirigèrent vers l’infirmerie, et Grandgoujon, comme tous les hommes qui appréhendent le pontife de la Médecine, à qui l’armée et la guerre confèrent la toute-puissance, même s’il est d’une ignorance sans fond ou d’une stupidité incurable, Grandgoujon demanda avec effroi :

— Comment est-il le major ?

— Oh ! fit Quinze-Grammes, c’est qu’un brutal !

Une vingtaine d’hommes attendaient, mélan-