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Page:Benjamin - Le Major Pipe et son père, 1918.djvu/183

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LE MAJOR PIPE ET SON PÈRE

nique, illustrée par tant de marins, combattants ou voyageurs, donne de l’éclat à ces promesses ; et la flotte de demain vient au monde, somptueuse aussitôt par des souvenirs qui la grandissent plus vite que l’effort de dix mille ouvriers.

Mais il faut s’élever au-dessus de ces chantiers énormes pour juger l’importance des vaisseaux que la terre d’Angleterre prépare à son empire naval. Une grue de cent soixante pieds domine tout, plus géante que les géants qu’elle aide à construire. Il faut monter jusqu’au sommet. D’en bas, c’est elle qui écrase et qui stupéfie ; d’en haut, on s’explique qu’elle soit forte et qu’elle travaille avec aisance, car tout paraît réduit et s’humanise.

M. John Pipe n’avait rien d’un gymnaste : mais il tenait à voir ces merveilles dans leur ensemble. Et il grimpa les cent soixante pieds derrière Barbet, ayant le nez sur les talons de celui-ci, son macfarlane volant au vent, le serrant aux jambes, son chapeau s’entêtant à vouloir s’envoler, ses cheveux se rabattant sur les yeux. Et l’escalier de la grue était fait de marches en fer, étroites, entre lesquelles M. John Pipe voyait le vide, des cuirassés, les chantiers, les bateaux, la