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LE MAJOR PIPE ET SON PÈRE

Barbet et le superbe Si Hadj ben el Haouri firent d’abord une halte dans son bureau. En soufflant et reniflant, il leur annonça avec allégresse qu’il avait deux mille cinq cents femmes occupées à fabriquer par jour huit cents obus lourds et autant par nuit, et que, parmi ces deux mille cinq cents femmes, c’était à qui travaillerait avec le plus d’ardeur. Puis il commença deux ou trois phrases laudatives, qui ne réussirent pas à sortir tout à fait, et il s’en tira par un rire, disant : « Venez, venez ! Vite, venez vite ! » Alors, Barbet et le superbe Si Hadj ben el Haouri entrèrent dans des ateliers où, dès la porte, ils ne purent s’empêcher d’écarquiller les yeux, car ces ateliers étaient décorés comme pour une fête, de feuillages et de drapeaux. Barbet pensa :

— C’est en notre honneur.

Il voulut boutonner correctement son veston : deux boutons manquaient. Puis, le patron leur dit que cette décoration était là depuis trois ans : seulement, on la renouvelait : ces femmes avaient besoin d’un tel décor pour travailler dans la joie.

Des tours tournaient, des courroies couraient, d’énormes grues évoluaient dans toute la longueur de l’atelier. Il y avait tout l’horrible bruit