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Page:Benoist - Le Théâtre d’aujourd’hui, 1re série, 1911.djvu/230

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LE THÉATRE D’AUJOURD’HUI

oublié l’esthétique du Théâtre-Libre, et s’est laissé aller à sa vraie nature. Les scènes du premier acte, où la mère Rousset gronde sa fille de ne pas Taimer assez, celles du dernier acte, où elle s’attendrit en la voyant si pâle et si triste, sont pénétrées d’une émotion qui va au cœur, et qui n’a pas peu contribué au succès de la pièce.

Ce don de peindre la vie populaire, de faire parler aux ouvriers et aux paysans leur vrai langage, on le retrouve dans plusieurs des œuvres de Brieux, et c’est même ce qui leur donne leur saveur. Ce qui a fait le succès des Remplaçantes ^ ce ne sont pas les sermons laïques du Dr Richon sur l’allaitement maternel ; c’est le rôle de Lazarette, la nourrice, ce sont ceux des deux Planchot, son mari et son beau-père. Le vieux Planchot surtout, avec son humeur impérieuse, son âpre amour de l’argent, son habileté sournoise et tenace, est dessiné de main de maître : sa discussion avec sa bru, qui ne veut pas se placer comme nourrice et qu’il oblige à faire sa volonté, tour à tour rude et insinuant, mêlant les prières aux menaces, est une scène excellente. Dans le personnage de Lazarette il y a un peu plus de convention ; mais lorsqu’au dernier acte elle revient chez elle pour retrouver l’enfant qu’elle a abandonné malgré elle et pour reconquérir son mari sur une coquine qui a pris sa place en son absence, il y a dans tout ce qu’elle dit, dans tout ce qu’elle fait, une décision, une vaillance, une bonne humeur, qui nous tiennent sous le charme, en même temps qu’elles obligent