Page:Benoit L Atlantide.djvu/167

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ce qu’ils peuvent donner. Elle leur prête son corps tandis qu’elle les domine de son âme. C’est la première souveraine que la passion n’ait jamais faite, même un instant, esclave. Jamais elle n’a eu à se ressaisir, car elle ne s’est jamais abandonnée. Elle est la seule femme qui ait réussi la dissociation de ces deux choses inextricables, l’amour et la volupté.

M. Le Mesge se tut un moment, puis reprit :

— Elle vient, une fois par jour, dans cet hypogée. Elle s’arrête devant ces stalles. Elle médite devant ces statues rigides. Elle touche ces poitrines froides, qu’elle a connues si brûlantes. Puis, après avoir rêvé autour de la stalle vide où bientôt il dormira pour toujours dans sa froide gaine d’orichalque, nonchalante, elle s’en retourne vers celui qui l’attend.

Le professeur cessa de parler. La fontaine s’entendit de nouveau au milieu de l’ombre. Mes poignets battaient, ma tête était en feu. Une fièvre immense me brûlait.

— Et tous, tous, — criai-je, sans souci du lieu, — ils ont accepté ! Ils ont plié ! Ah ! Elle n’a qu’à venir, elle verra bien.

Morhange se taisait.

— Cher Monsieur, — dit M. Le Mesge d’une voix très douce, — vous parlez comme un enfant. Vous ne savez pas. Vous n’avez pas vu Antinéa. Dites-vous bien une chose, c’est que, parmi eux, — et d’un geste, il embrassa le cercle muet des statues, — il y avait des hommes aussi courageux que