Cet aigle qui ſi haut s’éleve dans la nuë,
Et ſur tout l’Univers tient ſon aile étenduë,
Va ſuccomber ſous toy, tu restes le plus fort,
Tu luy ravis ſa gloire en me donnant la mort,
Tu m’empeſches de voir le rivage du Tibre,
Sans toy j’ay veſcu Reine, & par toy je meurs libre.
Mais d’où vient que mon cœur craint & fuit ſon repos ?
Quelle ſubite horreur ſe gliſſe dans mes os ?
Indigne mouvement ! ceſt lâchement ſe rendre,
S’il eut eu plus de force, il me ſeroit plus cher,
Et la nature ailleurs le devoit attacher.
Madame, qu’avec vous je quite la lumiere,
Non, non, je veux, ma sœur, la ſuivre la premiere,
Et c’eſt à moy l’honneur de ce ſecond trépas,
Ô mort ! Depeſche-toy que je ne pleure pas.
La mienne va pareſtre, & ne ſera point veuë,
Ma constance fera des efforts ſuperflus,
Et ſera ſans témoins en pareſſant le plus ?