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LA MORT D’ACHILLE.

Et vous vous ſouvenez qu’il nous a fait paſtir,
Mais ſommes-nous au temps de nous en reſſentir,
Nous qui n’avons plus rien de ce pouvoir antique ?
Non, flattons le ſerpent de peur qu’il nous repique,
Ne nous reſſentons point de tant d’affreux combas,
Sauvons ſeulement Troye, & ne la vangeons pas.

Polixene.

Suivant vos loix, Madame, on n’eſt jamais blâmable,
Vous voulez que je l’ayme, hé bien il eſt aymable,
Je prefere à mes vœux le commun intereſt,
Et le trouve charmant à cauſe qu’il vous plaiſt,
Je rendray mon deſir conforme à vôtre attente.

Hecube.

Que nous ſerons heureux ! que vous ſerez contente !
Vous avez en cela de faciles moyens
De faire triompher la valeur des Troyens,
Vous regnerez, les Dieux vous en feront la grace,
Quels ſeront vos enfants, cette ſuperbe race,
Eſtant fils d’un Achille, & neveux d’un Hector ?
N’eſtimerez-vous pas un ſi riche threſor ?
Achille eſt un époux que le Ciel vous envoye,
Et l’aymant vous aymez Priam, Hecube, & Troye.

Pâris pareſt armé.

Mais le jeune Pâris ayant quitté ſon rang
Vient couvert de ſueur, de poußiere, & de ſang.