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STANCES, SONNETS, ÉPIGRAMMES.


Ah ! qu’il est difficile, et que l’on a de peine
À supporter un faix qu’on voudroit décharger !
Je nourris dans le cœur une espérance vaine
De m’en voir dégager.

Je combats vainement, ma passion trop forte
A réduit ma raison à ne plus résister,
Et ressemble au vaisseau que le courant emporte
Sans pouvoir s’arrêter.

Il n’est point de beauté ni de grâce certaine
Que je puisse nommer l’objet de mes amours ;
Toutes sortes d’appas, me causant de la peine,
Font que j’aime toûjours.

Si quelqu’objet sur moy jette des yeux modestes,
Sa pudeur me ravit, il devient mon vainqueur,
Et de si doux regards sont les flâmes funestes
Qui m’embrasent le cœur.

Si je trouve au contraire une Dame affétée,
Son langage un peu libre a pour moy des appas,
Et la place me plaît, qui peut être emportée
Sans beaucoup de combats.