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XXI
PRÉFACE

enfin, c’est un génie singulier qui a plus employé d’esprit dans ses badineries, qu’il n’y en a dans la plupart des poëmes les plus achevés[1]. »

Benserade entreprit, quelque temps après sa réception à l’Académie, de mettre les Métamorphoses d’Ovide en rondeaux. Cet ouvrage, à l’usage de Monseigneur le Dauphin, fut imprimé supérieurement et enrichi de gravures de Leclerc et Lepautre, aux dépens du Roi, qui dépensa plus de dix mille livres pour cette édition[2].

Les rondeaux n’eurent aucun succès et tombèrent à plat, ils donnèrent cependant lieu à un rondeau épigrammatique, attribué jusqu’ici à Chapelle, mais qui est réellement d’un sieur Stardin. Cette satire si élégamment mordante eut plus de succès que tous les rondeaux de Benserade. La voici :


À la fontaine où l’on puise cette eau
Qui fait rimer et Racine et Boileau
Je ne bois point, ou bien je ne bois guère ;
Dans un besoin, si j’en avois affaire,
J’en boirois moins que ne fait un moineau.
Je tirerai pourtant de mon cerveau
Plus aisément, s’il le faut, un rondeau,
Que je n’avale un plein verre d’eau claire
À la fontaine.

  1. La colère de Furetière contre Benserade venait sans doute de ce qu’assis un jour à l’Académie dans le fauteuil de Furetière, Benserade s’écria : « Pardon, Messieurs, si je parle mal, mais je suis dans une place qui va m’inspirer beaucoup de sottises. »
  2. Métamorphoses d’Ovide en rondeaux, in-4o, de l’Imprimerie royale, 1676.