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le maître de la terre

une inquiétude ou un chagrin troublait sa bonne humeur ordinaire. Ce fut elle qui, la première, se leva, et sortit de la salle à manger.

— Sais-tu si maman a quelque chose ? demanda Olivier.

— Oh ! répondit Mabel, c’est toujours l’affaire de ces viandes artificielles ! La pauvre femme ne peut pas s’y habituer ; elle croit que nous allons en être, tous, malades.

— Et rien d’autre ?

— Non, mon chéri, je suis sûre qu’il n’y a rien d’autre ! Elle n’aurait point manqué de m’en parler, s’il y avait eu quelque chose.

Quelques instants après, la jeune femme sortit, à son tour, et Olivier la suivit des yeux jusqu’à la grille du jardin. Il avait été un peu troublé, deux ou trois fois, les jours passés, par quelques paroles étranges qui avaient échappé à sa mère. Celle-ci, dans sa première enfance, avait reçu une éducation chrétienne ; et son fils avait parfois l’impression que des traces de cette influence de jadis se réveillaient en elle. C’est ainsi qu’elle avait déterré, parmi ses vieux livres, un certain Jardin de l’âme ; et souvent elle se plaisait à le lire, tout en protestant qu’elle n’attachait aucune importance à son contenu. N’importe, Olivier aurait préféré qu’elle brûlât ce mauvais livre : car il savait que la superstition est chose tenace, et fort capable de reprendre possession d’un cerveau affaibli. Le christianisme, d’après lui, était une croyance à la fois