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SCIENCE DE LA MORALE.

s’ils échappent à l’action de la loi, soit faute de preuves suffisantes, soit par toute autre cause, peuvent rentrer dans le domaine de la Déontologie. Mais ce n’est pas là le sujet que nous nous proposons de traiter. Il est désirable sans doute d’élargir le champ de la morale et de rétrécir celui de l’action politique. La législation n’a que trop empiété sur un territoire qui ne lui appartient pas. Il ne lui est arrivé que trop souvent d’intervenir dans des actes où son intervention n’a produit que du mal ; et ce qui est pire, elle est intervenue dans les opinions, et spécialement dans les opinions religieuses où son intervention a été on ne peut plus pernicieuse. En un mot, on peut considérer la Déontologie ou morale privée comme la science du bonheur fondé sur des motifs extra-législatifs, tandis que la jurisprudence est la science par laquelle la loi est appliquée à la production du bonheur.

L’objet des désirs et des efforts de tout homme, depuis le commencement de sa vie jusqu’à la fin, est d’accroître son propre bonheur, en tant que formé de plaisir et dégagé de peine.

Mais encore, qu’est-ce que le plaisir ? qu’est-ce que la peine ? Tous les hommes s’en forment-ils la même idée ? Loin de là : le plaisir, c’est ce que le jugement d’un homme, aidé de sa mémoire,