Page:Bentzon - Le Roman d’un muet, 1868.djvu/254

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vis-à-vis d’elle aux banalités de tous les jours, lui parut au-dessus de ses forces. Il alla passer la journée aux Roches, dans le cadre poétique où s’était renoué d’une façon si inespérée le roman fermé jadis. Il revit lentement, avec la dévotion qu’on apporte à un pèlerinage, tous les lieux qu’ils avaient la veille traversés ensemble. Elle avait laissé sur une table de la laiterie rocaille un gros bouquet de fleurs des champs, cueillies, en se promenant avec lui. Dans l’air imprégné de leur parfum léger, des paroles d’amour semblaient flotter encore.

Gaston resta une heure les lèvres collées sur ce bouquet, évoquant mille souvenirs et mille espérances pour se distraire du malaise moral qui envahissait par moment la meilleure et la plus loyale partie de lui-même. Ce malaise se secouait sans grand’peine ; il n’est pas dans