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rier touchait de la harpe, parfois il entonnait un chant plein de faits tristes et véridiques, parfois il narrait quelque curieux récit ; d’autre fois encore il pleurait la vaillance de sa jeunesse, et son esprit s’enflammait en se rappelant toutes ces choses. — C’est ainsi que nous passâmes toute la journée à l’intérieur en nous divertissant3 jusqu’au moment où la nuit se fut faite pour les hommes. La mère de Grendel fut bientôt prête pour la vengeance ; elle s’avança soucieuse de la mort de son fils. Elle le vengea alors en tuant l’un des guerriers ; Æsc-here, le sage conseiller, périt sous sa griffe. Quand le matin fut venu les Danois ne purent le charger sur le bûcher et le livrer aux flammes, car la furie avait emporté son corps sous le torrent de la montagne. Ce fut le coup le plus terrible que Hrothgar eût éprouvé depuis longtemps. Alors le roi rempli d’affliction me supplia d’aller, avec ta permission4, combattre en chevalier dans la mer, de risquer ma vie, de m’acquérir de la gloire : il me promit au retour une récompense. J’allai trouver la gardienne de la mer. Pendant quelque temps nos bras se confondirent dans la lutte ; la mer roulait du sang ; mais je coupai sa tête dans la salle avec une large épée (je n’étais pas encore destiné à mourir). Hrothgar me donna de nouveau des trésors. »

XXXI

« Telle était la libéralité du roi : je ne perdis rien de la récompense, mais le fils d’Healfdene voulut encore me donner des trésors ; ces trésors je veux te les apporter et te les donner en présent. Mon affection t’est toujours acquise car je n’ai guère de proches, hormis toi, ô Hygelac. »

Il donna l’ordre d’apporter la bannière1, le casque, la cotte de mailles et l’épée qu’il avait reçus de Hrothgar, puis il dit ces paroles :

« Hrothgar m’a donné cette cotte de mailles en me prescrivant de t’en dire l’histoire ; elle a été longtemps pos-