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Page:Bera - Double Histoire - Histoire d un fait divers.djvu/74

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pétrifié dans ma honte, le nez dans ma collerette et la main derrière l’oreille. Parvenir ! grand Dieu, je ne demandais pas mieux, moi, — bien que j’ignorasse tout à fait ce que c’était ; — mais l’avenir m’attirait peu, je l’avoue. Je l’aurais donné tout entier pour une heure de récréation au jardin ; puis, mon père m’ayant dit qu’il fallait savoir le latin pour être un homme, la vie m’apparaissait toute hérissée de déclinaisons, et j’enviais, à ce point de vue, le sort des enfants du peuple, que je voyais jouer dans la rue tout le jour.

« Toutefois, je me serais bien gardé de changer mon sort pour le leur, et si peu de joie que me donnât mon titre de fils de bourgeois, j’y tenais déjà par fierté. Une des premières choses que nous apprenons à distinguer, c’est la démarcation qui existe entre les gens du peuple et les gens de loisir, ou de professions libérales. Ceux-ci étaient reçus dans le salon avec de grandes chatteries ; ceux-là à la cuisine, et on les appelait par leur nom, d’un air supérieur. Le mépris est