Aller au contenu

Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/290

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de concierge, à découper des mots dans les feuilletons…. Elle en fait des phrases qu’elle adresse sous pli à des gens qu’elle ne connaît pas et dont elle pique les noms, au hasard, avec une épingle à cheveux, dans un vieux Bottin périmé.

— Comment, elle ne me connaît même pas ?

— Ni vous, ni votre dame. C’est par plaisir. Elle charge son neveu, jeune apache de quatorze ans, plein d’avenir, du soin de semer ses compositions dans les boîtes à lettres devant lesquelles il passe. La vôtre doit venir de Saint-Denis.

— Ce neveu, où loge-t-il ?

— Ah ! dame… où il peut, le chérubin.

— Et la tante ?

— Secret professionnel. Nous ne dénonçons point, nous voyons seulement.

— Merci, madame.

— A votre service.

Une concierge, la lettre venait d’une concierge, que récréait idiotement ce jeu d’empoisonneuse et qui l’exerçait dans les vingt arrondissements ! Mais disait-elle vrai, la somnambule ? Intelligente, perspicace, digne de sa réputation considérable, certes, si la divination était une science ; or elle n’est qu’un art. Et