Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 4, 1913.djvu/101

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tération et comme l’oïdium de la prose. La seule paille qu’il voyait dans le bronze de Molière c’était ces espèces d’assonances reproduites de douze en douze syllabes, qui gênaient tant la diction des « parts entières » de sa compagnie et gâtaient le Tartuffe comme Le Misanthrope. Il ne se trompait pas d’ailleurs, mais pour d’autres raisons. Le moindre risque que j’encourusse à lui soumettre la csardas frénétique de tympanon lyrique qu’est La Nuit Bergamasque, était qu’il m’en renvoyât le manuscrit par deux gendarmes. S’il ne le fit pas, c’est que déjà déclinant, il ne résistait plus aux agressions, mais je connus par Cadet le coup que je lui avais porté.

— Mon cher ami, il a été terrible. J’entre dans son cabinet et je le vois, comme pris de rage, mordant le bord de son bureau directorial et poussant de petits cris alternés de patient qu’on roue en cadence. Il te lisait. Je courus à lui. — Monsieur Perrin, monsieur Perrin, mon cher directeur !… — Ah ! c’est vous, Cadet ? Il est votre ami, je le sais… Qu’est-ce que je lui ai fait ? Tenez, voyez, il ne dérime pas ! L’oreille en crève. C’est le supplice du chapeau chinois. J’aime mieux mourir, dites-le-lui, mourir.

— Du reste, ajoutait Cadet, tu as eu tort, c’est un vieillard, et il nous a fait gagner beaucoup d’argent par sa création des mardis. Toute la bourgeoisie a repris le chemin du théâtre, comme au temps de M. Scribe.

— Et de M. Thiers, avoue toute ta joie.

— Enfin il t’engage à t’éviter la lecture au comité, et mon frère aussi, si tu veux le savoir, tu sais pourtant s’il t’aime, Coquelin !