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Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 3, 1912.djvu/218

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Et il va, comme étourdi, vers la toile que l’hôte a sur le chevalet, un portrait de jeune femme. — Ne regardez pas ça, crie Leighton, et d’un geste rapide il voile le portrait, c’est une commande.

Puis, sous prétexte de nous montrer le plus beau Satzuma connu, et qui l’est à s’en faire bouddhiste, il nous entraîne à une collation improvisée où j’ai certainement bu une coupe de vin olympien des dieux, tel qu’Hébé le verse encore au pauvre Jupiter et dont deux doigts suffiraient, je vous le jure, à changer les neuf muses en dix-huit bacchantes. Le nom de ce vin ? Leighton nous le dit, mais en anglais, et de Nittis, déjà incapable de le traduire, n’a jamais pu se rappeler. — Tout ce dont je me souviens c’est qu’il a porté un toast à la France et aux Français et que tu lui as répondu assez bêtement : Vous en êtes un autre ! — J’étais gris, Peppino, gris de ces faïences. Et puis était-ce donc si bête ? Il n’est Anglais que pour la forme, le Président de la Royale Académie. — « Si qu’on » le leur troquait contre Cbnl ? fait-il d’une langue encore lourde ? — Qui Cbnl ? — Décidément, tu n’as pas le don des idiomes.

Étions-nous dans l’état de grâce voulu pour visiter la Nationale Galerie, je n’ose le certifier, mais il était propice peut-être pour voir les Turner, et nous nous y résolûmes. Portique de l’édifice désolant, plus laid, s’il est possible que le Wellington en Achille, au grand nez de bronze, d’Hyde Park. Entrons. Mais le musée est fermé. C’est le jour des copistes et des élèves peintres, le jeudi ; nous nous donnons pour tels et nous passons. Le gardien est bonhomme, il nous tend la main, conciergement.

Miséricorde, que de peintresses, et fagotées ! C’est