Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 3, 1912.djvu/295

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Paris, 14 décembre 1881.
« Cher Monsieur Bergerat,

« Je n’ai nullement oublié ce que je vous avais promis, sur votre demande, et la sympathie que m’inspirent votre travail et votre courage n’avait pas besoin d’être réchauffée. Mais la tâche est vraiment difficile, et, après lecture faite, j’en suis encore à me demander où des coupures utiles et sérieuses pourraient être pratiquées. S’il ne s’agissait que d’un échenillage de mots, ou même de phrases, parfois, il est évident que la chose est aisée, et il n’y a pas de chefs-d’œuvre pour lequel on n’en pût faire autant ; mais c’est là besogne de répétitions.

« La difficulté porte sur le redressement et le réajustage des grandes lignes, car il m’est impossible d’admettre que des suppressions équivalant à une demi-heure au moins de durée matérielle n’arrivent point à déranger sur certains points l’équilibre de votre machine — moralement très machinée.

« D’ailleurs, l’ouvrage, dans son entier, est conçu et voulu en une forme et dans un style d’une telle nouveauté pour la pratique habituelle du théâtre — et c’est là une de ses maîtresses curiosités, à mon sens — que je ne sais en conscience de quel côté et dans quel sens conseiller des ciseaux. Si, du prétendu monstre, nous allions faire un eunuque ? Là est le danger, et par conséquent, le scrupule pour un médecin consultant.

« À votre place, j’irais donc tout d’abord de l’avant, et, puisque la chance vous offre un directeur à peu près convaincu, en me réservant de discuter et de