Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 4, 1913.djvu/11

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vous voulez, de nos scènes parisiennes. Il m’apprit un jour qu’il venait d’acquérir le bail du théâtre de la Renaissance et que la première œuvre qu’il voulait y monter était du vaincu de la Comédie-Française. Il était allé la lui demander le jour même, et il la tenait par traité. La seconde, avait-il ajouté crânement, sera, j’espère, du vaincu de l’Odéon.

Victrix causa diis placuit sed victa Catoni, lui avais-je répondu, et vous êtes Caton lui-même. — Oh ! ces débuts des directeurs, ils sont frais comme l’aurore. Que j’en ai vu chez moi les mains pleines de fleurs et les lèvres de sourires, qui à la première centième décrochée dans le stade où on les décroche, avaient oublié jusqu’au nom que je leur faisais passer sur ma carte. C’est au théâtre que le mot de Nisard est vrai et qu’il y a deux morales, celle du succès et celle du four, car le directeur, lui, est toujours le même, et il n’en est pas sorti de l’arche de Noé deux types de l’espèce.

La comédie que Fernand Samuel avait rapportée de sa visite à Henry Becque était La Parisienne, écrite, je crois, avant Les Corbeaux, et que tous les directeurs lui rendaient sans, je l’espère pour eux, l’avoir lue. Si elle ne fut pas le premier spectacle de la Renaissance, elle en fut le deuxième ; et l’effet, cette fois, se dessina si considérable que les industriels du métier en blêmirent et que le trouble régna dans les ateliers à façon dramatiques. Était-ce là ce qu’à présent le public demandait ? Fallait-il désormais « faire du Becque » pour rallier les moutons panurgiens de M. Payant, pasteur mobile de la Recette ? Et les contrefacteurs se décidèrent vite, ils « troussèrent » des « Parisiennes », ils en troussent encore,