Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 4, 1913.djvu/316

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avaient enrichi ces habiles et laborieux agriculteurs, héritiers des principes de Cadmus et de Deucalion. Jalousés par leurs voisins de Vico et du Niolo, les Maïnotes eurent à essuyer plusieurs agressions de leurs compatriotes d’adoption, et, notamment, à l’époque de Paoli, la fidélité bien naturelle qu’ils avaient gardée à Gênes, leur bienfaitrice, ruina à moitié leur colonie. On les brûla, on les pilla, et ils ne durent qu’à M. de Marbeuf de pouvoir reconstruire la ville.

Ils se résignèrent alors à contracter des unions fusionnistes avec les Corses, ce à quoi ils avaient toujours été jusque-là rebelles, et aujourd’hui leur sang hellène est si bien mêlé avec le sang sarrasino-cyrnéen, que les ethnographes en sont pour leurs peines.

Ce mélange, d’ailleurs, ne paraît pas leur avoir beaucoup réussi ; car ils ne sont plus que neuf cent trente. Toujours industrieux d’ailleurs, et laborieux, ils continuent à donner aux Corses l’exemple des vertus pastorales, et leur commune est une véritable ferme modèle.

Le golfe de Sagone oppose une antithèse assez violente à celui de Porto. C’est une anse fertile, verdoyante, où la Liscia dépose des vases et des limons gras que les bruyères, les amandiers et même les cerisiers couvrent de leurs feuillages. Il semble que l’on élèverait là à miracle des moutons de présalé.

À Sagone, la vue se repose et l’esprit s’apaise. Le golfe est d’ailleurs magnifique, deux fois plus large que le golfe rouge, et on y ferait un port de premier ordre. Il est très sûr. C’est le seul de toute la côte