pénétrer par un acte d’intuition jusqu’au principe même de la vie. Pour percer le mystère des profondeurs, il faut parfois viser les cimes. Le feu qui est au centre de la terre n’apparaît qu’au sommet des volcans.
Sur les deux grandes routes que l’élan vital a trouvées ouvertes devant lui, le long de la série des arthropodes et de celle des vertébrés, se développèrent dans des directions divergentes, disions-nous, l’instinct et l’intelligence, enveloppés d’abord confusément l’un dans l’autre. Au point culminant de la première évolution sont les insectes hyménoptères, à l’extrémité de la seconde est l’homme : de part et d’autre, malgré la différence radicale des formes atteintes et l’écart croissant des chemins parcourus, c’est à la vie sociale que l’évolution aboutit, comme si le besoin s’en était fait sentir dès le début, ou plutôt comme si quelque aspiration originelle et essentielle de la vie ne pouvait trouver que dans la société sa pleine satisfaction. La société, qui est la mise en commun des énergies individuelles, bénéficie des efforts de tous et rend à tous leur effort plus facile. Elle ne peut subsister que si elle se subordonne l’individu, elle ne peut progresser que si elle le laisse faire : exigences opposées, qu’il faudrait réconcilier. Chez l’insecte, la première condition est seule remplie. Les sociétés de fourmis et d’abeilles sont admirablement disciplinées et unies, mais figées dans une immuable routine. Si l’individu s’y oublie lui-même, la société oublie aussi sa destination ; l’un et l’autre, en état de somnambulisme, font et refont indéfiniment le tour du même cercle, au lieu de marcher, droit en avant, à une efficacité sociale plus grande et à une liberté individuelle plus complète. Seules, les sociétés humaines