Page:Bergson - Le Rire.djvu/207

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d’une pente facile, qui est le plus souvent la pente de l’habitude. On ne cherche plus à s’adapter et à se réadapter sans cesse à la société dont on est membre. On se relâche de l’attention qu’on devrait à la vie. On ressemble plus ou moins à un distrait. Distraction de la volonté, je l’accorde, autant et plus que de l’intelligence. Distraction encore cependant, et, par conséquent, paresse. On rompt avec les convenances comme on rompait tout à l’heure avec la logique. Enfin on se donne l’air de quelqu’un qui joue. Ici encore notre premier mouvement est d’accepter l’invitation à la paresse. Pendant un instant au moins, nous nous mêlons au jeu. Cela repose de la fatigue de vivre.

Mais nous ne nous reposons qu’un instant. La sympathie qui peut entrer dans l’impression du comique est une sympathie bien fuyante. Elle vient, elle aussi, d’une distraction. C’est ainsi qu’un père sévère va s’associer quelquefois, par oubli, à une espièglerie de son enfant, et s’arrête aussitôt pour la corriger.

Le rire est, avant tout, une correction. Fait pour humilier, il doit donner à la personne qui