Page:Bergson - Le Rire.djvu/64

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ment, d’autres notes surgissent d’elles-mêmes, moins sonores que la première, liées à elles par certaines relations définies, et qui lui impriment son timbre en s’y surajoutant : ce sont, comme on dit en physique, les harmoniques du son fondamental. Ne se pourrait-il pas que la fantaisie comique, jusque dans ses inventions les plus extravagantes, obéît à une loi du même genre ? Considérez par exemple cette note comique : la forme voulant primer le fond. Si nos analyses sont exactes, elle doit avoir pour harmonique celle-ci : le corps taquinant l’esprit, le corps prenant le pas sur l’esprit. Donc, dès que le poète comique donnera la première note, instinctivement et involontairement il y surajoutera la seconde. En d’autres termes, il doublera de quelque ridicule physique le ridicule professionnel.

Quand le juge Brid’oison arrive sur la scène en bégayant, n’est-il pas vrai qu’il nous prépare, par son bégaiement même, à comprendre le phénomène de cristallisation intellectuelle dont il va nous donner le spectacle ? Quelle parenté secrète peut bien lier cette défectuosité physique à ce