Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/217

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de la contradiction me fait les supporter, comme je le dois, c’est-à-dire silencieusement et même avec résignation. Mais, dès que la contradiction frappe sur mes idoles (car je suis un fanatique évidemment), tout mon sang se bouleverse, mon cœur bondit et bat si rudement, que sa souffrance ressemble à de la colère et doit paraître offensante à mes interlocuteurs.

J’ai l’amour du beau et du vrai, tu as raison d’en convenir ; mais j’ai un autre amour bien autrement furieux et immense : j’ai l’amour de l’amour. Or, quand quelque idée tend à priver les objets de mes affections des qualités qui me les font aimer, et qu’on veut ainsi m’empêcher de les aimer, ou m’engager à les aimer moins, alors quelque chose en moi se déchire et je crie comme un enfant dont on a brisé le jouet. La comparaison est juste : c’est certainement puéril, je le sens et je ferai tous mes efforts pour me corriger. Enfin, tu m’as puni chrétiennement, en rendant le bien pour le mal ; car ta lettre m’a rendu heureux. Laisse-moi te serrer la main et te remercier.

Tes notes sont excellentes. Je crois que je m’en tirerai. Mais jamais je ne fus moins disposé à écrire. Ce feuilleton est du grand nombre de ceux que je ne sais pas commencer. Et je suis si triste en dedans… La vie s’écoule… Je voudrais tant travailler et je suis obligé de labourer pour vivre… Mais qu’importe tout !…

Adieu, adieu