Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/24

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un parti sage, les pères ayant l’habitude de vouloir que leurs héritiers directs continuent les traditions de la famille, le fils d’un général étant militaire (le plus souvent) et le fils d’un avocat, avocat. Seulement, les pères proposent et les garçons disposent ; nous voyons des romans remplis de ces exemples-là, sans compter que la réalité se charge quelquefois de copier les romans. Pour le savant et honorable médecin de la Côte-Saint-André, les pots-pourris que son fils écrivait sur des thèmes italiens n’étaient qu’un passe-temps agréable, les romances composées sur des paroles de Florian (toujours en mode mineur) servaient de soupapes de sûreté à une imagination trop échauffée ; pour Hector Berlioz, au contraire, c’étaient les seuls travaux qui le séduisissent, les seuls auxquels il s’intéressât. Vainement, le père étalait-il dans son cabinet l’énorme traité d’ostéologie de Munro, contenant des gravures de grandeur naturelle « où les diverses parties de la charpente humaine étaient reproduites très-fidèlement » ; l’adolescent, dédaignant ces superbes os, s’amusait à feuilleter le traité d’harmonie de Rameau ou celui de Catel, qu’il était parvenu à se procurer : — « Apprends ton cours d’ostéologie, dit un jour le père, je te ferai venir de Lyon une flûte garnie de nouvelles clefs… » Ce fut la première et la dernière fois, je suppose, que le sévère Munro fit progresser quelqu’un dans l’art de jouer de la flûte.

Il commençait à être temps de pousser plus à fond les insuffisantes études médicales commencées au logis ; Paris, Montpellier, Strasbourg, délivraient des diplômes de docteur ; M. Louis Berlioz se décida à envoyer son fils à Paris. Celui-ci s’y rendit en compagnie d’un sien cousin, excellent musicien lui-même, mais candidat moins frivole aux grades de la Faculté ; par la suite, M. A. Robert devint, en effet, l’un des praticiens les plus distingués de la capitale.