Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/321

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a eu la bonté de me gâter, laquelle lettre m’annonçait que l’empereur nous avait nommés officiers de la Légion d’honneur… oui, madame, vous et moi… Ainsi faites vos arrangements pour changer de ruban, de croix, etc.

Vous n’avez pas voulu venir dîner chez le ministre ; nous étions soixante, y compris le chien de Son Excellence, qui a bu son café dans la tasse de son maître. Il y avait un grand écrivain, M. Mérimée, qui m’a dit ceci : « Il y a longtemps que l’on aurait dû vous nommer officier ; et cela prouve bien que je n’ai pas encore été ministre. » Samson chancelait sous le poids de sa joie.

Vous voyez que je ne vais pas trop mal aujourd’hui et que je suis beaucoup plus bête qu’à l’ordinaire ; je souhaite que la présente vous trouve de même. Paris est en fête ; vous n’y êtes pas… La plage de Villerville doit être bien triste… comment pouvez-vous y rester ? Massart va à la chasse ; il tue des mouettes, quelque cachalot par-ci par-là ; et Dieu sait comment vous parvenez à tuer le temps ! Vous délaissez votre piano et je parie que, lorsque vous reviendrez, vous aurez de la peine à faire la gamme en si naturel majeur, la plus facile des gammes. Voulez-vous que j’aille vous faire une petite visite ?… Vous ne risquez rien de dire : oui ; car je n’irai pas. Ah ! pardon ! je redeviens sérieux ; les douleurs me reprennent. Je vais me rejeter sur mon lit. Je vous serre la main à tous les deux.