Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/368

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CLVI.

À M. WLADIMIR STASSOFF.


Paris, 21 août 1868.

Mon cher Stassoff,

Vous le voyez, je supprime le « Monsieur » ; j’arrive de Grenoble où l’on m’a fait aller à peu près de force pour présider une espèce de festival orphéonique et assister à l’inauguration d’une statue de l’empereur Napoléon Ier.

On a bu, on a mangé, on a fait les cent coups et j’étais toujours malade… ! On est venu me chercher en voiture, on m’a porté des toasts auxquels je ne savais que répondre. Le maire de Grenoble m’a comblé de gracieusetés, il m’a donné une couronne en vermeil, mais il m’a fallu rester une heure entière à ce commencement de banquet.

Le lendemain, je suis parti ; je suis arrivé exténué chez moi, à onze heures du soir…

Je n’en puis plus, et je reçois des lettres… où l’on me demande des choses impossibles. On veut que je dise beaucoup de bien d’un artiste allemand, bien que je pense en effet, mais à condition que je dirai du mal d’un artiste russe qu’on veut remplacer par l’Allemand et qui a droit au contraire, à beaucoup d’éloges, chose que je ne ferai pas. Quel diable de monde est-ce là ?

Je sens que je vais mourir ; je ne crois plus à rien, je voudrais vous voir ; vous me remonteriez peut-être ; Cui et vous me donneriez peut-être du bon sang.