Page:Berlioz - Les Soirées de l’orchestre, 1854.djvu/183

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célèbre école de musique, ou son père, peu fortuné sans doute, crut-il, en l’y introduisant, le mettre sur la voie d’une carrière facile autant que modeste, et ne prétendit-il faire de lui que le maître de chapelle de quelque couvent ou de quelque église du second ordre ? C’est ce que j’ignore. Je pencherais volontiers pour cette dernière hypothèse, eu égard aux dispositions pour la vie religieuse manifestées par tous les autres membres de la famille de Spontini. L’un de ses frères fut curé d’un village romain, l’autre (Anselme Spontini) mourut moine il y a peu d’années dans un couvent de Venise, si je ne me trompe, et sa sœur, également, a fini ses jours dans un monastère où elle avait pris le voile.

Quoi qu’il en soit, ses études furent assez fructueuses à la Pietà pour le mettre bientôt à même d’écrire, à peu près comme tout le monde, une de ces niaiseries décorées en Italie, comme ailleurs, du nom pompeux d’opéra, qui avait pour titre i Puntigli delle donne. Je ne sais si ce premier essai fut représenté. Il inspira toutefois à son auteur assez de confiance en ses propres forces et d’ambition pour le porter à s’enfuir du Conservatoire et à se rendre à Rome, où il espérait pouvoir plus aisément qu’à Naples se produire au théâtre. Le fugitif fut bientôt rattrapé, et, sous peine d’être reconduit à Naples comme un vagabond, mis en demeure de justifier son escapade et les prétentions qui l’avaient inspirée, en écrivant un opéra pour le carnaval. On lui donna un livret intitulé gli Amanti in cimento, qu’il mit promptement en musique, et qui fut presque aussitôt représenté avec succès. Le public se livra, à l’égard du jeune maestro, aux transports ordinaires aux Romains en pareille occasion. Son âge, d’ailleurs, et l’épisode de sa fuite avaient disposé les dilettanti en sa faveur. Spontini fut donc applaudi, acclamé, redemandé, porté en triomphe, et… oublié au bout de quinze jours. Ce court succès lui valut au moins sa liberté d’abord (on le dispensa de rentrer au Conservatoire), et un engagement assez avantageux pour aller, comme on dit en Italie, écrire à Venise.

Le voilà donc émancipé, livré à lui-même, après un séjour qui ne paraît pas avoir été fort long dans les classes du