Page:Berlioz - Voyage musical en Allemagne et en Italie, II, 1844.djvu/64

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

rible... Pendant que notre malencontreux capitaine roulait au milieu des tonneaux que la secousse avait jetés sur le pont dans toutes les directions, le Vénitien, s’ élançant à la barre, prit le commandement de la manœuvre avec une autorité illégale, il est vrai, mais bien justifiée par l’événement, et que l’instinct des matelots , joint à l’imminence du danger , les empêcha de méconnaître. Plusieurs d’entre eux, se croyant perdus, appelaient déjà la madone à leur aide. « Il ne s’agit pas de la madone, sacredieuî s’écrie le commandant , au perroquet ! au perroquet !

tous au perroquet ! » En un instant, à la 

voix de ce chef improvisé , les mâts furent couverts de monde, les principales voiles carguées ; le vaisseau, se relevant à demi, permit alors d’exécuter les manœuvres de détail, et nous fûmes sauvés.

Le lendemain nous arrivâmes à Livourne à l’aide d’une seule voile, tant était grande la violence du vent. Quelques heures après notre installation à l’hôtel de l’ Aquila Nera , nos matelots vinrent en corps nous faire une visite, intéressée en apparence , mais qui n’avait pour but cependant que de se réjouir avec nous du danger auquel nous venions d’échapper. Ces pauvres diables, qui gagnent à peine le morceau de morue sèche et le biscuit dont se compose leur nourriture habituelle, ne voulurent jamais ac-