core, mais je m’étais écarté du chemin, je trébuchais dans l’herbe épaisse, trempée de pluie, qui s’enfonçait sous mes semelles. Lorsque je me suis aperçu de mon erreur, j’étais devant une haie qui m’a paru trop haute et trop fournie pour que j’espérasse la franchir. Je l’ai longée. L’eau ruisselait des branches, et m’inondait le cou, les bras. Ma douleur s’apaisait peu à peu, mais je crachais sans cesse une eau tiède qui me paraissait avoir le goût des larmes. L’effort de prendre mon mouchoir dans ma poche me paraissait absolument irréalisable. Je n’avais d’ailleurs nullement perdu connaissance, je me sentais simplement l’esclave d’une souffrance trop vive, ou plutôt du souvenir de cette souffrance — car la certitude de son retour était plus angoissante que la souffrance même — et je la suivais comme un chien suit son maître. Je me disais aussi que j’allais tomber dans un moment, qu’on me trouverait là, demi-mort, que ce serait un scandale de plus. Il me semble que j’ai appelé. Tout à coup mon bras qui s’appuyait à la haie s’est trouvé dans le vide, tandis que le sol me manquait. J’étais parvenu, sans m’en douter, au bord du talus, et j’ai heurté violemment des deux genoux et du front la surface pierreuse de la route. Une minute encore, j’ai cru que je m’étais remis sur pied, que je marchais. Puis je me suis aperçu que ce n’était qu’en rêve. La nuit m’a paru soudain plus noire, plus compacte, j’ai pensé que je tombais de nouveau, mais cette fois c’était dans le si-
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Apparence