Page:Bernanos - La France contre les robots.djvu/103

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sorte de foire universelle où la canaille internationale des Palaces et des Wagons-lits venait cuver son or à Montmartre, comme un ivrogne cuve son vin. La température ambiante était, même sous la pluie de février, celle d’un salon de bordel ; mais le franc, lui, tombait au-dessous de zéro et les éditeurs, rendus hystériques par leur propre réclame, à la manière d’un badaud qui voit son image reproduite à l’infini dans un jeu de glaces, découvraient un génie par jour. Qui n’a pas vécu en ce temps-là ne sait pas ce que c’est que le dégoût. Rien qu’en humant l’air des boulevards, vous auriez pu sentir l’odeur des charniers qui ne devaient pourtant s’ouvrir que dix-neuf ans plus tard. Il y a ainsi parfois, au plus profond de l’hiver, des jours où vient on ne sait d’où, le parfum des haies d’aubépines, encore nues pourtant sous la neige. J’allais et venais, tantôt heureux, tantôt malheureux, mais toujours avec, à la poitrine, le creux de l’angoisse. Oh ! cela non plus