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SOUS LE SOLEIL DE SATAN

effort… En vérité, je ne sais encore… Enfin j’avais fait le projet… de trouver… de trouver dans un couvent une place, au moins provisoire…

— Un couvent !… Vos pareils, monsieur, n’ont que ce mot à la bouche. Le clergé régulier est l’honneur de l’Église, monsieur, sa réserve. Un couvent ! Ce n’est pas un lieu de repos, un asile, une infirmerie !

— Il est vrai…, voulut dire l’abbé Donissan, mais il ne fit entendre qu’un bredouillement confus. Les joues écarlates, que l’extrême émotion n’arrivait pas à pâlir, tremblaient. C’était le seul signe extérieur d’une inquiétude infinie. Et même sa voix se raffermit pour ajouter :

— Alors, que veut-on que je fasse ?

— Que veut-on ? répondit le doyen de Campagne, voici le premier mot de bons sens que vous avez prononcé. Vous avouant incapable de guider et de conseiller autrui, comment seriez-vous bon juge dans votre propre cause ? Dieu et votre évêque, mon enfant, vous ont donné un maître : c’est moi.

— Je le reconnais, dit l’abbé, après une imperceptible hésitation… Je vous supplie cependant…

Il n’acheva pas. D’un geste impérieux, le doyen de Campagne lui imposait déjà silence.