Page:Bernanos - Sous le soleil de Satan, tome 1, 1926.djvu/82

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
90
SOUS LE SOLEIL DE SATAN

et c’est vers elle qu’il tendit les bras, avec une espèce de gémissement.

— Mou… Mouchette, supplia-t-il… ma petite Mouchette !

Elle se laissa saisir. Mais du creux de son giron elle dardait son regard des mauvais jours.

— Bon… Bon… tu m’aimes…

— Voyons, fit-il, tout à l’heure…

— Attends un moment, dit-elle, je vais me rhabiller. Je gèle.

Quand elle parla de nouveau, il la vit, déjà blottie, son manteau boutonné, les pieds sagement joints, les mains croisées sur les genoux.

— Après tout ça, mon vieux, tu ne m’as seulement pas examinée ?

— Quand tu voudras.

— Non ! Non ! s’écria-t-elle. À quoi bon ? Ce sera pour une autre fois. D’ailleurs, j’en sais là-dessus plus long que personne ; dans six mois je serai mère, comme on dit. Jolie mère !

M. Gallet suivait des yeux le dessin du tapis.

— La nouvelle me surprend, fit-il enfin avec une gravité comique. J’allais tout à l’heure m’expliquer. Cette grossesse est invraisemblable. Laisse-moi t’avouer, non sans graves raisons… Mais tu vas t’emporter de nouveau.

— Non, dit Germaine.

— Nous n’avons, toi et moi, dans les choses