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Page:Bernanos - Sous le soleil de Satan, tome 2, 1926.djvu/121

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LE SAINT DE LUMBRES

seule distraction, je ne puis détourner ma pensée de certains souvenirs, et parmi ceux-là du plus douloureux, la malheureuse et inexplicable fin de M. le curé de Lumbres. J’y reviens sans cesse. J’y vois un de ces événements, si rares en ce monde, qui passent la commune raison. Ma faible santé subit le contre-coup de cette idée fixe, et j’y vois la principale cause de mon affaiblissement progressif, et de la perte presque totale de l’appétit.


Ces dernières lignes réjouiront n’importe lequel de ces détrousseurs de documents humains, que nous laissons aujourd’hui barbotants et reniflants dans les eaux basses. Mais, à les lire, sans curiosité vile, en laissant retentir en soi-même l’écho de cette plainte naïve, on comprendra mieux ce qu’il y a de détresse sincère dans cet aveu d’impuissance, écrit d’un style ainsi soutenu. Le suprême effort de certains hommes simples, nés pour un labeur paisible, et qu’une merveilleuse rencontre a jetés au cœur des choses, dans un seul éclair vite éteint, — lorsqu’on les voit s’appliquer, jusqu’à la dernière minute de leur incompréhensible vie, à rappeler et ressaisir ce qui jamais ne repasse