Page:Bernard - Brutus.djvu/84

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Je vois tout ce qu’en toy je pouvois deſirer ;
Mais tes vertus ne font que me deſeſperer.
Merite maintenant ta mort & ma colere,
Ne montre plus un fils à qui n’eſt plus ton pere ;
À Rome en te perdant quand je marque ma foy,
Peut-eſtře je deviens plus criminel que toy.

TITUS.

Ne vous reprochez point un Arreſt equitable,
Seigneur, mon crime a dû vous rendre impitoyable.
Nous ſommes dans ce jour trop juſtement punis,
Adoptez la Patrie au lieu de vos deux fils.
Si je puis en mourant vous faire une priere,
Qu’Aquilie innocente, & vôtre priſonniere,
Qui ſe charge d’un crime afin de me ſauver,
N’éprouve point le ſort que je vais éprouver.
Dépendante d’un pere injuſte, impitoyable,
Elle a pleuré, gemi de ſon deſſein coupable,
Et luy ſeul m’a ſurpris dans un moment d’effroy,
Où j’ay craint qu’un rival ne l’emportât ſur moy.
Je ſeray trop heureux, Seigneur, ſi quand j’expire,
Pour laver mon forfait mon ſang ſeul peut ſuffire.
Conſolez-vous, mon pere, & ſongez que Titus,
S’il n’euſt point eu d’amour euſt eu quelques vertus.
Je n’oſe demander un ſouvenir plus tendre
Pour un fils criminel ce ſeroit trop pretendre.

BRUTUS.

Tu peux eſperer tout hors de me conſoler.
Adieu mon fils, adieu, je ne puis te parler