Page:Bernard - Godfernaux - Triplepatte (1906).djvu/129

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
116
TRIPLEPATTE
BOUCHEROT.

Croyez-en ce que vous voudrez, je vous aime. Tout ce qui arrivera ne sera pas de ma faute, mais de la vôtre ; vous n’aurez pas voulu Vous servir du moyen de salut qui se présenté à vous, et c’est le seul…

LE VICOMTE, seul devant une petite table.

Oui, je le sais ! Je sais que, si je me marie, ma tante là chanoinesse paiera mes dettes et que je n’aurai plus d’embarras d’argent. Mais une fois que je n’aurai plus ces ennuis, je ne penserai pas que je ne les ai plus et je ne serai pas plus heureux pour ça… En revanche, j’aurai une femme.

BOUCHEROT.

Eh bien ! quoi ! vous aurez une femme ! Vous ferez comme tant d’autres, vous finirez par en prendre votre parti. (Il vient s’asseoir en face du vicomte.) Écoutez ! Je vais vous dire une chose confidentielle : la femme que vous épouserez, je ne la connais pas, mais elle est certainement moins ennuyeuse que la mienne, ça je le dis hardiment !

LE VICOMTE.

Pas possible !

BOUCHEROT, en confidence.

J’ai, entre nous, la femme la plus insupportable qui soit. Eh bien ! je n’en suis pas plus malheureux ! Je suis même assez content. Quand on n’est pas libre on dit : Oh ! la liberté ! la liberté !… Et si on l’a, on ne sait qu’en faire… Il vaut mieux avoir avec soi un compagnon, même embêtant, que d’être