Page:Bernard - La science expérimentale.djvu/29

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comme vous faites tous ; il me fait réellement comprendre. » Et, de fait, il avait compris. Cette aisance, il l’importait de ses habitudes physiologistes dans le domaine philosophique. Nul ne fit jamais plus simplement, plus naïvement une découverte. Dans cette phase première de la chasse aux idées, comme disait Helvétius, qui consiste à voir et lever le gibier, il apportait une sûreté de vue, une perspicacité étonnante. La plupart des chercheurs scientifiques sont des espèces de somnambules qui ne voient que ce qu’ils cherchent, que ce qui est sur la trace de leurs idées ; leur œil est fixé sur un point, et non-seulement ils ne perçoivent pas ce qui passe à côté de ce point, mais même ce qui s’y présente sans avoir été prévu. Claude Bernard semblait, suivant l’expression d’un de ses élèves, avoir des yeux tout autour de la tête, et c’était avec stupéfaction qu’on le voyait, au cours d’une expérience, signaler des phénomènes évi-