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Page:Bernardin de Saint-Pierre - Paul et Virginie, Didot, 1806.djvu/166

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ET VIRGINIE

voisins. Elles portoient toujours avec elles quelques recettes utiles aux maladies ordinaires aux habitants, et elles y joignoient la bonne grace, qui donne tant de prix aux petits services. Elles réussissoient sur-tout à bannir les peines de l’esprit, si intolérables dans la solitude et dans un corps infirme. Madame de la Tour parloit avec tant de confiance de la Divinité que le malade en l’écoutant la croyoit présente. Virginie revenoit bien souvent de là les yeux humides de larmes, mais le cœur rempli de joie, car elle avoit eu l’occasion de faire du bien. C’étoit elle qui préparoit d’avance les remedes nécessaires aux malades, et qui les leur présentoit avec une grace ineffable. Après ces visites d’humanité, elles prolongeoient quelquefois leur chemin par la vallée de la Montagne-longue jusque chez moi, où je les attendois à dîner sur les bords de la petite riviere qui coule dans mon voisinage. Je me procurois pour ces occasions quelques bouteilles de vin vieux, afin d’augmenter la gaieté de nos repas indiens par ces douces et cordiales productions de l’Europe. D’autres fois nous nous donnions rendez-vous sur les bords de la mer, à l’embouchure de quelques